Gideon la Neuvième - couverture

A certains égards, Gideon la Neuvième pourrait être un jeu-vidéo plutôt cool. On y incarnerait une guerrière badass et/ou une nécromancienne dans un immense palais décrépit. Elles y résoudraient des énigmes et affronteraient d’étranges ennemis, le tout dans un univers de dark fantasy mâtiné de science-fiction. A un univers étrange et bien fichu, la Néo-zélandaise Tamsyn Muir s’est permis d’ajouter une bonne histoire, des personnages étonnants et, finalement, décidé d’en faire un roman (après tout, les amateurs de jeux ont déjà les Dark Souls).

Gideon, pour commencer, en impose. Excellente guerrière au caractère de cochon, elle ne désire rien d’autre que de fuir sa planète natale, la lugubre Neuvième Maison (les Maisons correspondant grosso modo aux neuf planètes du système impérial). Elle voue une haine aussi tenace que réciproque à Harrowhark, jeune et puissante nécromancienne avec laquelle elle se retrouve obligée de coopérer. En effet, l’Empereur appelle à lui ses Maisons et les voilà donc en route vers la capitale. A la clé : l’immortalité, probablement.

Le déroulement du récit nous donne bien sûr l’occasion de voir évoluer la relation entre les deux protagonistes et d’en apprendre davantage sur leur haine réciproque. Les représentants, et surtout les représentantes, des autres Maisons ne manquent pas non plus de caractère et se réservent bien des surprises mutuelles. J’évoquais le jeu-vidéo, mais ce roman peut aussi faire penser à une murder party, par son aspect huis-clos dans lequel chacun, chacune, semble avoir quelque chose à cacher. Bien sûr, on peut chipoter : je n’ai par exemple pas toujours bien pris la mesure des lieux, qu’on nous présente pourtant comme immenses. C’est peut-être le propre de cet univers bizarre : la mort y est tellement présente qu’il y manque parfois un peu de vie, ce qui est - on l’admettra - tout à fait cohérent. Gideon, de toute façon, est assez vivante pour dix personnes.

Au fond, ce bouquin est une sorte de plongée au sein d’un empire du Mal très codifié luttant pour sa survie, aux pratiques étranges et occultes. Il est aussi super kiffant. Comme sa (superbe) couverture l’indique, c’est le premier d’une série, Le tombeau scellé, prévue pour être une tétralogie. Il possède toutefois une vraie conclusion et peut se suffire à lui-même si on aime les fins ouvertes, ce qui ne gâche rien.

_Titre original : Gideon the Ninth / Sortie originale (anglais) : 2019 / Version française : 2022 (traduction : _ Stéphanie Lux)