
Avec ce roman, je savais que je m’attaquais à quelque chose de spécial. Je m’attendais à un livre ardu, n’évoquant son principal sujet qu’à demi-mot, passant régulièrement du coq-à-l’âne et multipliant les passages à la limite du cryptique. Comme j’étais très intrigué, j’ai quand même eu envie de le lire. Hildegarde de Bingen, dont je n’avais pourtant jamais entendu parler, a vécu au XIIème siècle du côté de l’actuelle Allemagne. Multipliant les casquettes, elle était, je cite Wikipédia : à la fois abbesse, mystique, visionnaire, illustratrice, compositrice, poétesse, fondatrice et prédicatrice franconienne." C’était aussi “une figure marquant l’apogée de la médecine monastique à la fin du Haut Moyen Âge.” Un superbe CV, aujourd’hui presque suffisant pour décrocher un CDD à mi-temps. J’étais toutefois prévenu : de Hildegarde, il n’en serait pas vraiment question avant un paquet de pages.
Quelle ne fut pas ma surprise de réaliser rapidement quelque chose de crucial concernant ce livre : l’écriture y est fluide et ça se lit vachement bien. De quoi affronter plus facilement que prévu une variété de thèmes tournant, de près ou de loin, autour de la moniale, et s’en approchant progressivement. Certains chapitres sont de l’ordre du conte, de la légende, d’autres ont une dimension héroïque ou historique, d’autres encore revêtent un caractère davantage biographique, sans parler de passages complètement bibliques. L’ensemble est bien sûr imprégné de catholicisme (on est en plein Saint-Empire romain germanique), mais au-delà de cela il semble surtout que Léo Henry a tenté de retranscrire l’esprit de l’époque. Il nous le fait percevoir par de multiples facettes toutes reliées d’une façon ou d’une autre au personnage central de Hildegarde (pour être honnête, je crois bien avoir lu cette analyse quelque part avant d’entamer ma lecture). Loin d’être indigeste, l’ensemble se lit comme une série de petites histoires qui, au fur et à mesure, finissent par former un tout cohérent. Il s’agissait de ma première lecture de Léo Henry, il y en aura certainement d’autres.
Sortie (français) : 2018