
Deuxième roman de la Française et Guadeloupéenne Marguerite Imbert, Les Flibustiers de la mer chimique a reçu un accueil très chaleureux des lecteurs et lectrices francophones, empochant notamment le Grand Prix de l’Imaginaire 2023. Derrière ce nom, qui évoque de vieux romans d’aventure un peu surannés, se dévoile la promesse d’un voyage dangereux, de territoires hostiles et probablement de quelques espèces de pirates.
Là-dessus, aucun mensonge sur la marchandise : nous sommes d’emblée cueillis par le naufrage d’un des protagonistes, Ismaël, à la dérive sur un radeau au milieu d’une mer toxique. Heureusement, lui et ses comparses sont bientôt recueillis par une pieuvre géante et un sous-marin atomique qui passait par là. A cette description, on comprend que l’autrice ne se prive pas d’un certain panache dans l’écriture de son univers post-apocalyptique. Loin d’être mort, ce monde grouille de vie, mais les humains y sont en nombre réduit et luttent pour leur survie au sein de communautés plus ou moins stables. En parallèle d’Ismaël, qui se débrouille à bord de son sous-marin baroque, on suit l’histoire d’Alba, jeune femme isolée récupérée au fond d’une grotte par des envoyés de Rome, où une sorte de civilisation semble vivoter. Particulièrement érudite pour son époque, elle semble souffrir de quelques troubles mentaux et posséder un égo démesuré. Elle est apparemment très importante pour Rome, ce qu’elle trouve tout à fait normal même si elle ne sait pas pourquoi.
Marguerite Imbert a réussi l’étonnant exercice d’écrire un roman post-apo réjouissant, peuplé de personnages intéressants et de d’idées rigolotes. C’est en tout cas peu dire qu’il se distingue des poncifs du genre. Son univers fonctionne (en ce sens que ses bizarreries ne semblent pas ajoutées au pied de biche pour faire joli) et son intrigue se lit sans peine, même si on se demande parfois où l’autrice veut en venir. Les enjeux sont peut-être un peu trop faibles ou trop peu entretenus, mais cette relative faiblesse est compensée par la facilité de lecture et la flamboyance de cet univers toxique et tordu. Je n’en ferai pas mon livre de chevet ni mon livre de l’année, mais il en aurait peut-être été tout autrement il y a dix ou quinze ans.
Sortie (français) : 2022